vendredi 20 juin 2014

Jeremie Almanza

Qui n’a jamais eu peur du noir lorsqu’il était enfant ? Ou n’a pas osé se lever la nuit de peur que le monstre « desouslelit » ne vous croque un ou deux doigts de pied ?
Jeremie Almanza a sans doute affronté toutes ces grandes aventures enfantines pour être aussi inspiré ! Dessinateur de bandes dessinées depuis 5 ou 6 ans, il n’en a pas le classique profil.
Après plusieurs années d’études en économie, il s’est fait repérer sur le fameux forum pour illustrateurs en herbe (plus ou moins haute) Café Salé où il postait régulièrement ses jolis croquis.


Séverine Gauthier, scénariste, a adoré son univers et lui a proposé un projet pour Delcourt qui a débouché sur Aristide broie du noir, BD en vers et en rimes pour enfants angoissés mais courageux !



L’univers d’Almanza est, comme il le rappelle souvent en interview, fortement influencé par celui des réalisateurs Caro et Jeunet pour les monochromes brun, vert ou rose orangé et leur côté loufoque. A moi, il me rappellerait plutôt le Tim Burton des Noces funèbres ou de l’étrange Noël de Mister Jack avec ses personnages aux grands yeux hallucinés, sa poésie gothique et son goût pour les monstres et doudous étranges.



Dans Eco, série en 3 volumes, le scénariste Guillaume Bianco lui a fait du sur mesure pour que Jérémie Almanza puisse utiliser toute la palette de son imaginaire. Ainsi est née l’adorable Eco, fille unique de couturiers, délaissée par ses parents et qui les conduira à la ruine et à la folie pour avoir été trop généreuse avec un petit garçon et son ancêtre affamés. Accompagnée par 4 doudous nommés Socrate, Diogène, Esope et Epictète, Eco tente de survivre dans ce lieu où l’amour n’a pas sa place; jusqu’au jour où, pour enrayer la malédiction dont elle se croit victime, elle entame une longue quête à travers le pays...



Ce conte pour grands enfants est une petite merveille d’imagination qui donne des étoiles dans les yeux... et l’envie de piquer les adorables doudous d’Eco !
Bref, Monsieur Almenza, continuez à me faire rêver!... siouplaît !
Maud

vendredi 13 juin 2014

Yaël Hassan

J'ai eu la chance de rencontrer cet écrivain dans une librairie à Chartres. J'ai été fascinée par son charisme, sa simplicité et sa gentillesse. Elle nous a parlé de son métier évidemment mais aussi de sa vie qui a été riche. Yaël Hassan n'a pas commencé tôt l'écriture, ce sont les circonstances de la vie qui l'ont poussée à écrire. 
En 1994, elle a eu un accident de voiture qui l'a clouée au lit pendant plusieurs mois. Suite à cet événement, elle a écrit "Un grand-père tombé du ciel". Ce roman raconte l'histoire de Léah qui se découvre un grand-père à l'âge de dix ans car il a décidé de venir vivre à Paris auprès de la famille qui lui reste. Mais apprivoiser ce grand-père ne va pas être facile pour la petite fille.
Durant cette rencontre, Yaël Hassan nous a expliqué qu'elle écrivait cinq romans en parallèle et que chaque matin, elle décidait lequel elle allait poursuivre. Incroyable n'est-ce pas ? Je n' ai entendu aucun autre écrivain travailler de cette façon.
En plus d'écrire des romans elle fait aussi des documentaires.  Le thème de l'Occupation et des Juifs est un sujet important pour cet auteur. Elle a donc publié en 2000, "A Paris sous l'Occupation". On suit l'histoire de deux enfants : Julien et Clara. Clara est née en France de parents d'origine polonaise juive et va devoir porter l'étoile jaune à partir de 1942 et son quotidien va être encore bouleversé par les nouvelles lois prises par le gouvernement de Vichy. En complément de cette histoire poignante, l'auteur nous donne des informations historiques sur la deuxième guerre mondiale. Ce documentaire est sérieux mais le fait de voir l'histoire par les yeux des enfants allège un peu le propos. On retrouve toute la sensibilité et l'humanité de Yaël Hassan
Ainsi cette période de l'histoire la touche particulièrement mais elle aborde aussi des thèmes comme le handicap. "De l'autre côté du mur" est le récit de Louise en colère contre le monde entier suite à un accident d'équitation qui l'a clouée dans un fauteuil roulant. Mais plusieurs rencontres décisives vont lui ouvrir à nouveau des perspectives d'avenir. 
Mais, j'ai eu envie de vous présenter cet auteur car un de ses derniers livres est une petite merveille :"La fille qui n'aimait pas les fins" qu'elle a écrit avec Matthieu Radenac. Maya est une dévoreuse de livres. Sa mère ne veut plus lui en acheter et l’oblige à s’inscrire à la bibliothèque. Tout d’abord réticente, elle va accepter cet état de fait, d’autant qu’elle va y faire une rencontre décisive pour elle. Manuelo est un vieux monsieur mystérieux et avec qui elle a beaucoup d’affinités. Leurs échanges réguliers va mener Maya à découvrir les secrets de son nouvel ami. J’ai adoré ce roman qui est très bien écrit. Les auteurs nous offrent une belle partition à quatre mains. Les personnages sont étoffés, le récit est très cohérent et la fin est vraiment très sympa.
Et pour terminer, je vous signale que Yaël Hassan a aussi écrit un témoignage sur son adolescence dans la collection Confessions chez La Martinière jeunesse. Cette collection permet à des auteurs variés de parler de leur jeunesse avec lucidité et sincérité. Et aussi un documentaire sur la civilité.



Et en écrivant ce texte, je réalise que ce vendredi 6 juin, en Normandie, les commémorations vont être célébrées avec tous les honneurs que méritent les anciens combattants.




Bonne lecture

Valérie

vendredi 6 juin 2014

Gustav Klimt : troisième partie.

3)               La période dorée : 1903 à 1909

C’est cette période qui, par la suite, restera dans les mémoires du public, quand on évoque la peinture de Klimt : des toiles claires, brillantes où les personnages sont peints dans des postures très originales, et sont entourés de volutes multicolores, sur des toiles de grand format.
Tout comme avant de changer de période et de passer dans la Sécession, Klimt a connu un changement assez singulier d’esthétique avant de passer réellement dans la période dite dorée.
Les premières prémices de ce changement se voient dans la toile nommée Judith et Holopherne qui date de 1901.

 On voit sur cette toile une femme, qui est à la fois très belle mais aussi très sûre d’elle, très inquiétante et très sensuelle. Elle met le menton en avant, d’un signe de défi, elle a les yeux presque clos, en signe de sensualité. On peut voir ses seins, dont un entièrement dénudé. L’œil du spectateur est frappé par les éléments dorés du tableau, dont le cadre où le titre est inscrit. Il faut suivre le bras droit de la femme pour trouver la tête de sa victime, Holopherne, qu’elle a elle-même décapité, selon la légende. Klimt n’a pas représenté la décapitation elle-même mais plutôt la satisfaction de Judith après qu’elle a décapité Holopherne. Le tableau ne porte donc aucune trace de sang. Tout l’accent est mis sur la femme, et sur l’idée qu’en a Klimt : une créature à la fois belle et inquiétante, sensuelle et froide. Le tour de cou doré de Judith donne aussi l’impression que sa tête est détachée de son corps : de là à y voir un rappel de la décapitation…


Mais l’œuvre qui marque cette transition de façon encore plus poussée et dont j'ai parlé dans le précédent article s’appelle la Frise Beethoven, en 1902. Elle a des dimensions dantesques : 2.16 m de haut et 29.95 m de long. Par conséquent, je ne mettrai que certains détails de la frise en photos.
Elle a été construite, plus que peinte, puisqu’elle fait appel à des matériaux différents tels que le plâtre, la nacre, les roseaux, l’or, les pierres semi précieuses.
Cette frise cherche à exprimer en images la Neuvième Symphonie de Beethoven, et s’inscrit dans un travail plus large, puisque ses amis de l’atelier vont monter une exposition qui tourne autour d’une statue du compositeur faite par Klinger. Pour cela, Klimt s’inspire d’un article écrit par Richard Wagner, qui a mis des mots sur cette symphonie. Ces mots racontent une histoire, et c’est cette histoire que Klimt met en images dans sa frise.
Le sujet de la frise est simple et tourne autour du fait que l’Homme recherche le bonheur. La frise met en scène un personnage : dans le détail 1, on voit un homme qui, vêtu comme un chevalier, dans une armure entièrement dorée représente l’humanité qui part à la quête du bonheur. Il est poussé par le Destin, et semble choisi pas les dieux (les deux personnages au-dessus de sa tête).
Cet homme va devoir traverser et vaincre de nombreux dangers pour arriver au salut de l’Homme. C’est ce que l’on peut voir dans le détail 3, avec le monstre en forme de singe, les femmes rousses et très sensuelles qui représentent la luxure et la présence de serpents qui évoquent le mal.
Or dans la frise, on voit que l’homme arrive à vaincre ces obstacles, aidé en cela de la personne que l’on voit sur le détail 2 : la Poésie, reconnaissable grâce à sa lyre. Elle est là pour le guider à travers les épreuves. Enfin, quand le chevalier a passé toutes les épreuves, il peut rencontrer l’amour et sceller cet amour dans une étreinte passionnée, dans un baiser qui signe la victoire de l’Humanité sur le mal (détail 4).
Le problème est que l’œuvre est surchargée d’allégories que le public n’a pas comprises, et l’absence de perspective a troublé grandement les spectateurs qui ont rejeté en bloc l’exposition sur Beethoven.

1905 : Les trois âges de la femme
Voici la toile qui exprime un thème régulier de l’œuvre de Klimt : une enfant, une femme jeune, et une femme vieille, avec toutes les questions sur l’impossibilité d’échapper à la vieillesse et à la mort.
  






1907-08 : Danaé
  On retrouve un thème mythologique, qui nous renvoie à ses débuts. C’est un épisode de la mythologie grecque, très sensuel puisqu’on voit Danaé qui reçoit la pluie de pièces d’or de Zeus entre ses cuisses. La pose est très érotique, on voit un sein, on voit la jeune femme d’un angle très peu banal, puisqu’on voit sa cuisse relevée au premier plan du tableau. La pluie de pièce est dorée, les cheveux de Danaé sont roux, d’un roux flamboyant qui représente la sensualité et l’érotisme. Ici Klimt brise un des tabous de l’époque : la représentation de la jouissance sexuelle de la femme.

1907-08 : Le Baiser
  Ce tableau est considéré comme le chef d’œuvre de Klimt, et c’est celui que tout le monde a à l’esprit quand on parle de lui. C’est cette toile qui symbolise la période dorée. Le format de cette toile est carré, on a un couple enlacé, dans  une étreinte qui semble à première vue être de l’amour. L’homme prend possession de la femme en prenant son visage fermement entre ses mains. La femme a une posture figée, ses mains sont crispées, et son visage est inexpressif. Ses orteils sont crispés au bord de ce qui semble être un précipice.
De ce tableau se dégage une atmosphère inquiétante, où la vision de l’amour est atténuée par une vision plus angoissante, qui dit au spectateur que tout peut finir précipitamment, que la mort est toujours associée à l’amour.
Voilà pour la période dite dorée de notre cher Gustav ! 
Il nous restera encore une dernière période à décortiquer ensemble, sa période Fauve ! "Roooaaoooaoaoaoaoarr", me direz-vous ! Ah non, pas ce fauve-là ! 
Quels blagueurs vous faites ! A bientôt ! 
Bérengère.